J’ai choisi le mot Ananta (sanskrit) pour diverses raisons. La plus valable à mon sens c’est par intuition. La première fois que je l’ai entendu, lors d’un cours de philosophie, il est resté gravé dans ma mémoire. La sonorité et la vibration de ce mot résonnent vraiment en moi.
Ananta a plusieurs significations en sanskrit. Comme un adjectif c’est l’infini, sans limites, l’expansion constante. Comme nom féminin, c’est la terre, le nombre 1, l’un des noms de Parvati. Il peut désigner aussi le ciel et l’atmosphère.
Comme nom masculin, il désigne la lettre ā, des nombreux noms de Vishnu. Mais désigne aussi, entre autres entités, mon préféré: le serpent cosmique (Ananta Shesha, qui a, lui aussi, plusieurs noms). Ananta Shesha serait ce qui reste lors que tout cesse d’exister, il ne peut pas être détruit car il n’est pas sujet aux transformations de ce monde.
Vishnu donc se repose sur ce serpent (qui a 5, 7 ou 1000 têtes selon les sources) entre deux ères de la création. Pendant qu’il dort, un lotus sort de son nombril qui donne naissance à Brahma qui va créer le monde. Puis Vishnu s’éveille et contemple cette nouvelle création.
Ce mythe donne naissance à une posture de yoga: anantāsana. B.K.S. Iyengar nous dit qu’une statue de Vishnu dans cette posture de contemplation se trouve dans un temple en Inde du Sud dédié à Ananta Padmanabha. Outre la photo à la Une de ce post, la forme la plus répandue est avec la jambe perpendiculaire au sol.
Selon un autre mythe trouvé ici, Ananta en tant que serpent cosmique a épié Parvati pendant que Shiva lui apprenait le yoga. Alors pour le punir d’avoir écouté en cachette, Shiva le « condamne » à transmettre le yoga aux humains. C’est pour cela qu’il prend la forme de Patañjali qui a codifié les Yoga Sutras.
J’aime comme le sanskrit ne permet pas de réduire un mot à un sens unique, mais propose toujours des gammes et des facettes qui parfois n’ont même rien à voir en apparence. Et je trouve que c’est une belle façon de se représenter le monde.
Si je devais résumer pourquoi j’ai choisi Ananta, je pense que c’est cette idée de ce qui reste une fois qu’on s’est débarrassés de tout ce qui fait obstacle dans notre vie. Je trouve que cela fait écho dans la recherche de « qui suis-je ». Même si elle doit passer par une observation attentive, la clé n’est pas dans le cumul de nouvelles connaissances, mais au contraire comme pour un oignon, dans le dépouillement des couches superposées.